In Platonis Phaedrum Scholia: 265b2-6
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Σωκράτης
τῆς δὲ θείας τεττάρων θεῶν τέτταρα μέρη διελόμενοι, μαντικὴν μὲν ἐπίπνοιαν Ἀπόλλωνος θέντες, Διονύσου δὲ τελεστικήν, Μουσῶν δ᾽ αὖ ποιητικήν, τετάρτην δὲ ἀφροδίτης καὶ Ἔρωτος, ἐρωτικὴν μανίαν ἐφήσαμέν τε ἀρίστην εἶναι,
Socrate
De la manie divine, en distinguant quatre parties pour quatre dieux, nous avons attribué à Apollon l'inspiration prophétique, à Dyonisos l'inspiration mystique, aux Muses l'inspiration poétique et la quatrième à Aphrodite et à Éros. Et nous avons dit que amoureuse est la meilleure des manies.
Platon, Phèdre, 265b2-265b6
Une autre chose que Socrate n’a pas dit: dans son discours il n’a pas été question d’Apollon ou de Dyonisos. Socrate a en effet fait une distinction entre différents types de manie: la “mantique” qui permet grâce aux dieux de deviner le futur, la oionoïstiké (deviner le futur en interprétant le vol des oiseaux), la poétique et finalement l’érotique. Mais s’il a été question des Muses et d’Éros, Socrate n’a jamais parlé des autres dieux.
Cela est vrai au moins en ce qui concerne le discours de Socrate que nous pouvons lire: le Phèdre. Car le discours de Socrate n’est pas écrit, dans la diégèse du dialogue, mais il est bien écrit vu que nous le lisons. Et nous ne pouvons pas savoir si le dialogue tel que nous le disons a été bien transmis, ou s’il y a des lacunes, des erreurs de transmission.
La matérialité du discours revient donc ici de plusieurs manières. En premier lieu, Socrate compare un discours écrit, celui de Lysias, avec ses discours oraux et il peut donc tricher sur ce que Phèdre se rappelle de ses discours car il n’y a pas de trace écrite. En deuxième lieu, en réalité, les discours de Socrate sont écrits, justement dans le Phèdre que nous tenons dans les mains - ou plutôt sur l’écran - et nous pouvons donc aller vérifier ce que Socrate a dit. En troisième lieu, le texte que nous lisons est le fruit d’une tradition particulière et matérielle et nous pouvons nous questionner sur l’état du texte dont nous disposons. Le texte lui-même nous pose des questions sur le texte. Le fait que Socrate dise de ses discours des choses qui ne s’y trouvent pas nous porte à nous questionner sur une éventuelle corruption du texte.