In Platonis Phaedrum Scholia: 265a8-b1

μανία

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Σωκράτης
μανίας δέ γε εἴδη δύο, τὴν μὲν ὑπὸ νοσημάτων ἀνθρωπίνων, τὴν δὲ ὑπὸ θείας ἐξαλλαγῆς τῶν εἰωθότων νομίμων γιγνομένην.
Φαῖδρος
πάνυ γε.

Socrate
Et l'idée de manie est double, une produite par une maladie humaine, l'autre par le divin abbandon des lois habitulles.
Phèdre
Certainement.

Platon, Phèdre, 265a8-265b1

En réalité cette précision sur la double nature de la manie n’a pas été faite dans les discours de Socrate. Au début de son second discours, Socrate a en effet parlé de manie et il en a donné une typologie. Mais toutes les manies dont il parle sont provoquées par les dieux.

Dans son premier discours, Socrate a évoqué rapidement la notion de manie, sans la thématiser et en la mettant du côté de la ὕβρις, la démesure. Mais il n’en a pas spécifié la nature.

La seule mention des deux types de manie est faite en passant. Socrate, dit: “si la manie était simplement mauvaise”. Il utilise le mot ἁπλόος. Si la manie était sans parties, unique. Ce “si” fait comprendre qu’il y a au moins deux aspects de la manie, un négatif et un positif. Ensuite, dans le second discours, Socrate se limite à parler de la manie “positive”, celle qui vient des dieux. La manie en tant que “maladie humaine” n’est donc jamais présentée, et surtout, l’analyse différentielle des deux sens de la manie n’arrive qu’ici, au moment de l’analyse des discours.

Socrate profite donc de ne pas avoir un texte écrit pour dire que ses discours ont dit quelque chose qu’en réalité ils n’ont pas dit.

Phèdre dit oui, il semble se rappeler de cette différenciation qui pourtant n’avait pas été faite. Et la raison de cela est claire: la distinction n’avait pas été faite explicitement, mais elle était implicite dans les discours et Phèdre l’a donc retenue. Mais le fait que cette distinction soit implicite est justement ce qui a permis à Socrate de faire les deux discours, d’avoir un discours qui dit le contraire de l’autre.

La possibilité d’affirmer une chose et son contraire dépend du fait de connaître l’essence des choses et ne pas la révéler explicitement au public.

Socrate sait que la manie est double, une maladie ou un don divin. Il ne le dit pas à Phèdre, il n’explicite pas cette définition, mais il l’utilise pour bâtir deux discours contradictoires.

Cela donne donc raison à l’analyse de l’art oratoire et à tout le discours sur la connaissance des essences qui vient d’être fait. Mais cela montre aussi que l’analyse et la critique du discours de Lysias ne sont pas correctes: on cherche dans le discours de Lysias ce qui a été tu aussi dans les discours de Socrate. L’art oratoire doit sans doute se baser sur la connaissance, mais cela ne signifie pas que cette connaissance doit être affichée et explicitée dans les discours. Chercher une définition de l’amour au début du discours de Lysias a été donc tendancieux.

μανία scholia