In Platonis Phaedrum Scholia: 258c10-d1

γράφειν

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Σωκράτης
τοῦτο μὲν ἄρα παντὶ δῆλον, ὅτι οὐκ αἰσχρὸν αὐτό γε τὸ γράφειν λόγους.
Φαῖδρος
τί γάρ;

Socrate
Il est donc complètement évident que le fait d'écrire des discours en soi n'est pas honteux
Phèdre
Pourquoi donc?

Platon, Phèdre, 258c10-258d1

Le fait d’écrire (γράφειν) des discours n’est pas honteux. Pourtant Socrate semblait dire le contraire jusqu’ici. Essayons de retracer les différents moments de cet échange qui est sur le point de finir.

Le point de départ a été l’affirmation de Phèdre selon laquelle Lysias n’aurait pas eu envie d’écrire d’autres discours car le fait d’écrire n’est pas bien vu par les politiciens. Phèdre nous dit donc qu’il y a une doxa selon laquelle écrire des discours serait un mal. Les braves gens - semble dire Phèdre - considèrent qu’écrire est honteux.

On retrouve ici une opposition entre deux sociétés et deux cultures, les mêmes qui sont en guerre dans Les Nuées d’Arisophane. D’une part une société simple et aux valeurs traditionnelles, une culture qui s’est affirmée pendant les guerres Médiques; de l’autre la société moderne, raffinée, qui aime la rhétorique, l’élégance et les discours - représentée par Lysias. Les politiciens font semblant d’adhérer aux valeurs simples et essentiels de la première mais sont finalement plutôt proches de la seconde.

Or on pourrait s’attendre de Socrate un penchant pour la première vision du monde - malgré le fait qu’Aristophane l’assimile à la seconde. On pourrait penser, justement que, pour être contre les sophistes comme Lysias, Socrate se rattache aux anciennes valeurs traditionnelles selon lesquelles écrire est honteux, c’est une pratique raffinée qui corrompt les mœurs simples et essentiels de la société traditionnelle.

Mais ce n’est pas le cas, car l’écriture en soi a une noblesse qui était aussi reconnue dans le passé: on cite donc Solon, Lycurgue et Darius. Le passé légitime et fait en sorte que l’on puisse considérer l’écriture comme une pratique qui va au delà de la simple mode moderne.

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