In Platonis Phaedrum Scholia: 257d3-8
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Φαῖδρος
ἐφαίνετο γάρ, ὦ Σώκρατες: καὶ σύνοισθά που καὶ αὐτὸς ὅτι οἱ μέγιστον δυνάμενοί τε καὶ σεμνότατοι ἐν ταῖς πόλεσιν αἰσχύνονται λόγους τε γράφειν καὶ καταλείπειν συγγράμματα ἑαυτῶν, δόξαν φοβούμενοι τοῦ ἔπειτα χρόνου, μὴ σοφισταὶ καλῶνται.
Phèdre
C'est ce qui me semblait, en effet, Socrate: et toi aussi tu sais que ceux qui ont le plus de pouvoir et qui sont le plus respectés dans les Cités ont honte d'écrire des discours et de laisser des écrits d'eux-mêmes, car ils ont peur d'avoir ensuite la renommée de sophistes.
Platon, Phèdre, 257d3-257d8
Phèdre continue sa farce. Sourd au commentaire ironique de Socrate, il fait encore semblant de croire à ce qu’il dit. En effet, il y a un décor de façade dans la politique de l’époque. C’est cette façade que Phèdre présente en faisant semblant de croire que c’est la seule vérité.
Phèdre est naïf, ou alors joue-t-il au naïf? À quel point ses affirmations sont à prendre au premier degré? À mon avis le jeune homme est beaucoup moins simple qu’il ne veut le faire croire. Ses répliques sont des taquineries et non des naïvetés: il est en train de provoquer Socrate, de le chauffer pour avoir sa réponse.
Les puissants (σεμνός) auraient honte (αἰσχύνω). Évidemment cela n’est jamais vrai: les puissants n’ont aucune honte. La honte ne fait pas partie de leurs sentiments. Ils peuvent, tout au plus, faire semblant d’avoir honte, pour faire plaisir aux gens, pour obtenir du consensus. Écrire des discours en plus n’est pas quelque chose de mal vu: la preuve en est l’amour de Phèdre pour Lysias. La peur de laisser des écrits de sa propre main (συγγράμμα) est aussi absurde: les politiciens aiment les honneurs et la gloire et sont prêts à tout pour pouvoir “rester” en laissant leurs discours.
Mais… il y a un mais: être appelés σοφιστής n’est pas bien. Il faut donc faire tout ce que font les sophistes en évitant l’appellatif. Et donc faire semblant de ne pas vouloir écrire, faire semblant d’avoir honte, etc.
Mais, Phèdre le sait bien, ce n’est qu’une pause.