In Platonis Phaedrum Scholia: 257d2

ἴσως, anarchie

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Σωκράτης
ἴσως δὲ καὶ τὸν λοιδορούμενον αὐτῷ οἴει ὀνειδίζοντα λέγειν ἃ ἔλεγεν.

Socrate
Et peut-être penses-tu que l'auteur de la critique le critiquait en disant ce qu'il disait.

Platon, Phèdre, 257d2-257d2

Le ἴσως revient. Rappelons-le: ce terme exprime un doute mélangé à un peu d’ironie. La phrase semble tordue: penses-tu que la critique était vraiment une critique? N’était-elle pas un éloge masqué?

La réponse est évidente: Socrate sait que l’écriture de discours est en réalité très prisée à cette époque. Mais il est significatif qu’il se sente obligé de le dire en utilisant l’ironie. Cette affirmation a finalement un double sens: l’écriture de discours élégants et provocateurs n’est pas officiellement prisée, mais elle l’est en réalité. La société de l’Athène du V siècle est prise dans cette contradiction, dans le tiraillement entre deux idéologies, deux types de valeurs. C’est tout le différend entre générations qui est mis en scène par Aristophane dans les Nuées: d’une part la bonne vielle morale guerrière qui a caractérisé la société pendant les guerres Médiques, de l’autre les mœurs sophistiqués qui caractérisent la renaissance après 480.

Les politiciens adhèrent à la seconde, mais ils ne veulent pas perdre le consensus de la partie de la population qui se reconnaît plutôt dans la première.

L’ironie est la bonne forme pour exprimer donc le manque de consistance et de cohérence des idées des politiciens: ils ne cherchent qu’à récolter du consensus - c’est ce qui est propre de la démocratie, n’est-ce pas? - et ils ne s’engageront jamais dans aucun sens par peur de perdre ce consensus.

La démocratie est toujours le pire des gouvernements possibles. Je trouve que cette idée est très actuelle et décrit bien les politiciens qui remplissent nous journaux et hantent nos sociétés. Mais c’est une autre histoire.

ἴσως, anarchie scholia