La musique populaire d’aujourd’hui : une industrie
Les chansons les plus connues aujourd’hui sont celles qui sont « radio friendly », c’est-à-dire les plus susceptibles de passer à la radio dans la mesure où elles sont conformes à certaines normes de format – avec un morceau d’une durée moyenne de 3 minutes et 30 secondes –, de tempo et/ou de structure.
Les chansons populaires actuelles comportent toutes dans leur structure une accroche, qui agit comme les earworms, c’est-à-dire suivant le principe du « vers d’oreille », phénomène expliqué dans un article de Ted Ed.
Structure rondo: Structure caractérisée par une alternance entre refrain et couplet. Le refrain est en général exposé au ton principal alors que les couplets explorent les tons voisins, par des contrastes mélodiques, rythmiques et harmoniques.[1] |
La structure rondo est majoritairement choisie car elle permet au public de s’approprier la chanson et d’en retenir au maximum l’air et/ou l’instrumentation. Si son aspect répétitif est certes synonyme de rythme et offre à l’auditeur un sentiment de familiarité, bien souvent, cette structure sert aussi de cache-misère et laisse parfois croire qu’écrire une chanson revient à simplement respecter un cahier des charges qui suit une instrumentation réduite au minimum et une ligne vocale basique.
L’instrumentation typique est alors la suivante : une ligne vocale (ou deux, si l’artiste ou le producteur a jugé bon d’étoffer un peu la composition du titre choisi), deux ou trois accords de guitare ou de piano (quand il s’agit de vrais instruments et non pas d’une batterie de sons créés par ordinateur), une percussion (batterie de fond, avec une utilisation régulière de la grosse caisse et de la caisse claire, sans présence aucune des autres toms, de cymbales ou d’autre forme de percussion, qui tend d’ailleurs à se transformer en « beat »), et une basse (électrique ou sèche), quand elle existe.
De plus, de manière générale, si l’on s’intéresse aux titres dont la langue est l’anglais, en traduisant on se rend compte que les paroles sont assez peu profondes et on comprend que l’auditeur doit alors s’appuyer sur l’aspect entrainant et entêtant de la ligne vocale, sur la voix de l’interprète ou sur le rythme de la chanson. Si l’on prend par exemple la chanson « Ciao Adios » de la jeune chanteuse Anne-Marie, les paroles sont relativement simples et l’instrumentation est majoritairement basée sur des sons électroniques, mais elle se fait remarquer par sa voix peu commune. Elle a donc l’avantage d’avoir une voix reconnaissable, appréciable ou non, faute de présenter un style particulier.
À l’inverse, Ed Sheeran, par son parcours inhabituel et sa ténacité, est capable de proposer un son et un style qui lui sont propres, tout en jouant des codes et des normes de la musique populaire. En effet, on réfère souvent à la musique d’Ed Sheeran comme à une musique douce, tendre et mélodieuse mais mon rôle est ici de prouver par l’analyse de quelques exemples qu’il offre plus que des ballades romantiques un peu candides et simplettes, et que le type de chansons pour lequel il est connu n’est pas très représentatif de sa musique.
L’avis du public : Ed Sheeran rassemble… ou presque
Un artiste populaire pour sa musique « pop » :
Ed Sheeran s’affirme comme un chanteur de « musique populaire » tout en mettant en avant sa richesse musicale et son étrangeté. Il répète d’ailleurs souvent : « I was a very, very weird child » (« Enfant, j’étais vraiment très étrange[2] »). Il est connu pour des titres tels que « Thinking Out Loud », « Photograph » et « Castle On The Hill », tous abordables et accompagnés d’une partie de guitare relativement simple au premier abord, et dans lesquels il aborde, comme la plupart des artistes dits « pop », des sujets universels mais rebattus comme l’amour et l’amitié.
Par exemple, « Thinking Out Loud », très populaire lors de mariages pour son caractère doux et chaleureux, est, autant dans les paroles que dans son instrumentation, mais aussi pour la chorégraphie qu’effectue le chanteur dans le clip, imprégnée de la poésie du britannique. La musique offre à l’auditeur un sentiment agréable et familier grâce à sa structure rondo portée par des couplets et refrains reprenant la même ligne de basse et les mêmes accords de guitare électrique, accompagnés d’une partie de piano qui s’apparente à une ligne seule, chantante.
Cependant, c’est par sa capacité à remplir le vide grâce à différents compléments (chœurs, solo de guitare électrique en gage de pont, partie vocale du refrain plus criée que chantée) et sa voix très reconnaissable (dans sa qualité comme dans sa technique, entre tessiture et utilisation de chant et cris) qu’Ed Sheeran réussit à faire de cette chanson basique un produit fini qui fonctionne commercialement, sur les ondes radios et en concert. Néanmoins, cette chanson est difficilement la plus aboutie, si l’on évoque la simplicité de l’instrumentation, de l’écriture et du style, en comparaison à d’autres de ses productions bien plus élaborées et intelligemment construites.
Mais un artiste qui divise… à tort ou à raison ?
Comme c’est le cas pour bien d’autres artistes de musique « pop », il est courant pour les artistes de recevoir des messages de haine ou des commentaires désobligeants sur les réseaux sociaux. Comme le plus souvent sur la plateforme YouTube, les commentaires que les utilisateurs postent sont négatifs et Ed Sheeran n’échappe pas à la règle. On peut par exemple lire sous une vidéo présente sur la plateforme YouTube :
« Very naive comment. Ed only writes pop music, and love songs. It’s a rarity you hear anything else. James does it all. Rock, metal, indie, rap, hip-hop.r&b, fight music, acoustic, soul and more. Not to mention his voice is 10 times more powerfully and emotive. The ability to convey emotion isn’t just atalent, it’s a gift. He’s way more credible too, Ed’s music is for little girls. You obviously need to do your homework ».
Ou
« Too old to listen to Ed Sheeran’s corny music and soft girly voice lol ».
Certaines personnes ne voient en Ed Sheeran qu’un « chanteur pop », seulement capable d’écrire des chansons d’amour empreintes de naïveté et à destination d’un public jeune, voire très jeune. Si quelques-unes des chansons de l’artiste britannique pourraient correspondre à cette description, force est de constater que son large répertoire lui permet, à force de travail, d’attirer un public large et varié.
Mais la réputation d’Ed Sheeran a surtout été écornée par quelques affaires de plagiat, comme celles qui émaillent trop souvent la musique populaire, parfois devenue si basique, uniformisée et abordable qu’il devient difficile de faire la part des choses entre « hommages » faits à d’autres artistes, influences musicales et véritable création. Dans le cas de l’affaire « Photograph », la ressemblance est flagrante. Toute la ligne vocale du refrain correspond presque note pour note à la chanson « Amazing » de Matt Cardle, et l’utilisation de la même technique vocale (voix de faucet) n’aide pas à se convaincre du contraire. En revanche, on pourrait douter de la légitimité de la requête des héritiers de Marvin Gaye dans l’affaire de plagiat entre « Let’s Get It On » et « Thinking Out Loud ». En effet, on peut postuler l’idée que cette traduction en justice a été motivée par le succès de la chanson de l’artiste britannique (ayant cumulé plus d’un milliard et demi de vues sur YouTube et d’écoutes sur les différentes plateformes de streaming), surtout si l’on prend en compte le fait que la suite d’accords de guitare utilisée dans les deux chansons est une suite dite « classique », puisqu’elle n’est pas des plus originales : les deux titres proposent un rythme à quatre temps, une tonalité en ré majeur et une suite d’accords tout à fait prévisible.
Ed Sheeran : un « weird child » de la musique populaire
Des sujets particuliers et une écriture poétique et personnelle :
Parmi les chansons les plus populaires d’Ed Sheeran, certaines ne sont pas aussi simples que « Thinking Out Loud » et Ed Sheeran se distingue de ses pairs avant tout pour ses qualités de parolier qui font de lui un artiste à textes (bien qu’un public non-anglophone ne soit pas nécessairement à même d’en juger).
Si « The A Team » et « New Man » semblent toutes deux entrer à première vue dans la catégorie « chanson joyeuse » (voire « chanson niaise » pour « The A Team »), elles surprennent par le thème qu’elles abordent. Alors que « Thinking Out Loud » est clairement une ode à l’amour et à la personne que l’on aime, les paroles de « The A Team » sont bien plus sombres et en complet décalage avec l’instrumentation à dominante de guitare, agréable et accueillante, écrite dans la tonalité de la majeur et composée de deux lignes de guitare sèche (accords et ligne mélodique), d’un solo de guitare électrique, d’une partie de piano et d’un rythme percussif frappé sur le corps de la guitare. En effet, tiré d’une histoire vraie, ce titre raconte l’histoire d’une jeune sans-abri prénommée Angel qui se prostitue et se bat pour s’en sortir et se défaire de son addiction à la drogue. « The A Team » correspond en fait à une drogue dite « de classe A » (de premier choix), même si un auditeur lambda ne comprenant pas la référence peut simplement penser à « The A Team » comme l’expression d’une catégorie sociale.
Dans un autre registre, « New Man » critique avec beaucoup d’humour la société actuelle en dressant la caricature de deux personnages superficiels, influençables, égocentriques et hyperconnectés :
I heard he spent £500 on jeans, Goes to the gym at least six times a week,Wears boat shoes with no socks on his feetAnd I hear he’s on a new diet and watches what he eats | Il paraît qu’il a acheté des jeans à 500£Qu’il fait du sport six fois par semaineQu’il porte des chaussures bateau sans chaussettesIl paraît même qu’il fait un régime et fait attention à sa ligne |
Every year he goes to Malaga with all the fellas, drinks beer but has a six pack, I’m kind of jealous. He wears sunglasses indoors in winter at night time and every time a rap song comes on he makes a gun sign |
Chaque année il va à Malaga, boit toujours de la bière avec ses « frères » mais a des abdos dont je suis jaloux. Il porte des lunettes de soleil de nuit, en hiver, en intérieur et quand une chanson de rap passe, il imite un flingue avec ses doigts |
Néanmoins, c’est dans certaines de ses chansons les moins connues qu’Ed Sheeran s’illustre vraiment dans l’écriture de ses textes. « Small Bump », issue de son premier album + (Plus), semble cristalliser une des caractéristiques qui font sa musique : un contenant qui contraste étonnamment avec son contenu, c’est-à-dire qu’Ed Sheeran maîtrise l’art de parfois dissimuler un message fort dans des chansons à l’air inoffensif.
Dans le cas de « Small Bump », on pourrait, jusqu’à la toute dernière phrase, croire qu’il s’agit d’une chanson à caractère autobiographique ou du moins écrite sous le point de vue du chanteur : « You might be left with my hair, but you’ll have your mother’s eyes » (« Tu auras peut-être mes cheveux, mais tu hériteras au moins des yeux de ta mère »). Le narrateur, à qui l’on attribue à priori la paternité, semble concorder avec l’auteur. Ce n’est qu’avec les derniers mots qu’on comprend qu’il ne s’agit ni d’un récit autobiographique (comme l’évoque le britannique dans un entretien avec Interview Magazine), ni d’une ode joyeuse à l’amour filial. Les qualités poétiques du britannique arrivent à nous soumettre (à) un témoignage du désespoir et de l’état de stupeur de parents faisant face à la douleur foudroyante que représente une fausse-couche, témoignage qui nous saisit brutalement et nous laisse expérimenter l’ahurissement mélancolique des protagonistes de la chanson. Si l’on se penche sur les paroles, on peut lire :
You were just a small bump unborn for four months then torn from lifeMaybe you were needed up there but we’re still unaware as why | Tu n’étais qu’un petit bout à naître,Arraché à la vie après quatre mois,Peut-être qu’on t’attendait là-haut,Impossible de savoir pourquoi |
De la même façon qu’il superpose les éléments d’instrumentation, Ed Sheeran joue dans cette chanson sur la juxtaposition d’images vivides et percutantes. Ses phrases courtes mais efficaces (de par des assonances en /æ/ et allitérations en /z/, qui donnent l’impression d’un récit qui nous est susurré) et l’utilisation d’asyndètes portent le sujet avec honnêteté et crudité. Ed Sheeran crée alors un tout cohérent, encore une fois dissimulé sous une instrumentation douce et mélodieuse, qui s’apparente à une berceuse :
I’ll hold your body in my handsBe as gentle as I canBut for now you’re a scanOf my unmade plans | « Je te prendrai dans mes bras,Tout doucement contre moi.Pour l’instant tu es l’échographieDes aléas de ma vie » |
Une construction musicale intelligente et recherchée
« I See Fire » : exemple d’un travail sur l’effet de superposition :
Ed Sheeran nous présente une œuvre à quatre temps (4/4) qui, malgré l’aversion du chanteur pour la musique classique[3], offre une composition intelligemment élaborée. On peut la décomposer selon ce schéma :
Mouvement 1 | Mouvement 2 | Mouvement 3 | Outro |
Couplet 1 + refrain | Couplet 2 + refrain | Pont | Refrain |
Amorce 1 Amorce 2
Ed Sheeran réussit à utiliser cette structure, qui s’apparente tout de même à celle du rondo, pour tour à tour amener et retenir la tension dans la chanson. Son refrain notamment, est l’une des parties les plus intéressantes parce qu’il évolue constamment. Par exemple, alors que dans le premier mouvement le refrain s’achève sur quatre mesures qui présentent le thème incarné par une voix chantante de guitare (0 :33 à 0 :46), dans le deuxième mouvement, la phrase récurrente « and I hope that you remember me » est suivie d’une mesure unique, qui annonce une rupture imminente.
AnacrouseGroupe de notes précédant le premier temps de la mesure initiale d’une œuvre.[4] |
À la fin de ce deuxième refrain, l’arrêt de la percussion, au profit d’une amorce composée d’une seule ligne de guitare (une note continue sur do #) et de violoncelle (une note continue sur ré#), crée un moment de flottement dans la chanson qui laisse l’auditeur suspendu aux lèvres de l’artiste. Cette amorce, soutenue par le départ en anacrouse du pont à travers les paroles « and if the night is burning… », crée un effet d’attente et amène l’auditeur au changement de tonalité. La reprise soudaine de la percussion[5] et de la guitare au début du pont (à 3 :33) est atténuée par l’introduction douce du violoncelle, qui sert de fil directeur tout au long du pont.
Dans ce pont, l’alternance de rondes puis de blanches, suivie de l’apparition d’une montée chromatique (sol b, la b, si b) permet à l’auditeur de s’imaginer un voyage long et semé d’embuches, en accord avec Le Hobbit : la désolation de Smaug, film pour lequel « I See Fire » a été écrite. Ces alternances et montées sont doublées par la ligne de guitare rythmique, qui joue chaque note en suivant le rythme de la percussion jusqu’aux deux mesures précédant le refrain. L’insistance sur un dernier accord de guitare (répété quatorze fois) permet d’introduire le refrain, durant lequel tous les instruments précédemment utilisés reviennent sur le devant de la scène par superposition. Dans cette dernière partie, Ed Sheeran crée un effet de « couleur locale » et offre à l’auditeur l’occasion de visualiser le feu, introduit par le roulement de timbale au dernier contretemps précédant le refrain, et soutenu par le gong et la lourdeur de la percussion jusqu’à la fin de l’œuvre. Entre timbales, gong, violoncelle, guitare et partie vocale, on remarque alors qu’Ed Sheeran s’est appliqué à composer une œuvre qui reprend une logique de montée jusque dans les lignes mélodiques, pour obtenir un final complet, riche en instrumentation et en chœurs, qui met en lumière toute ses capacités d’écriture et de production.
« Give Me Love » : exemple d’une instrumentation qui met en relief les paroles :
Ce titre a pour sujet les ravages d’un amour non partagé. À partir du deuxième refrain, Ed Sheeran superpose les lignes vocales, construites sur un écart de tierce, et piège l’auditeur dans un enchevêtrement musical, notamment relayé par l’entrée successive des instruments et des voix. Le côté sauvage et brute dans l’utilisation de sa voix de poitrine (qui constitue la voix principale), associé à un cri d’agonie (représenté par la ligne continue en voix de faucet), est sublimé par un cri de désespoir : il crie « love me » (« aime moi ») à plusieurs reprises. Ed Sheeran parvient à créer une image musicale que l’on pourrait apparenter à une traque dans une forêt terrifiante : chaque ligne vocale participe à créer du mouvement, entre branches d’arbres qui surgissent soudainement et hurlements de loups. De plus, la percussion, lourde et puissante, s’associe à une montée chromatique au violon pour donner un effet d’accélération des événements. Si on prend en compte les paroles, on comprend que toute cette horreur personnifie en fait l’alcoolisme, qui ravage le personnage de la chanson au point de lui ôter la vie : « […] tonight I’ll call you after my blood is drowning in alcohol » (« Je t’appellerai ce soir après avoir noyé tout mon être dans l’alcool »). Dans « Give Me Love », Ed Sheeran s’applique par conséquent à malmener l’auditeur et lui fait ressentir à son tour le désespoir en jouant entre les mouvements de ballotements et le martèlement des « love me » et « give me love » criés. Ces cris intempestifs surviennent tels les démons qui rongent l’âme du personnage, indésirables et oppressifs.
Les cinquante dernières secondes du titre, si elles s’entendent aussi comme une forme de soulagement par l’arrêt soudain de la percussion et des cordes frottées, font aussi allusion à la mort du personnage. La solution et résolution de cette histoire était donc que seule la mort pouvait permettre au personnage de se défaire de son désespoir, de son alcoolisme et de son mal-être.
Un artiste qui crée l’étonnement :
Contrairement à la plupart des artistes britanniques (sauf par exemple Anne-Marie ou Adele), Ed Sheeran conserve son accent du Yorkshire de l’Ouest, à la fois dans sa façon de chanter et dans son rap : on peut le voir comme un synonyme d’indépendance et de sa personnalité propre. Bien sûr, on sent tout de même dans sa musique certaines de ses influences, comme par exemple Bob Dylan ou Eminem, qu’on reconnaît dans la manière qu’il a de faire de ses chansons des histoires, personnelles et poignantes, sur un rap étonnamment mélodieux et percussif. On peut citer l’exemple du titre « Eraser », dont je ferai une analyse plus approfondie plus bas. Si la vitesse de paroles de ce titre est assez lente, Ed Sheeran fait aussi preuve de virtuosité pour ses capacités à rapper à une vitesse impressionnante. Des chansons comme « U.N.I. », cumulant alors vitesse, souffle, accent, jeux de mots, de sons et de mélodies, font d’Ed Sheeran un artiste « pop » hors-norme : on observe là un travail poussé sur les allitérations (notamment sur les sifflantes, repérées en gras) et les assonances (en /i:/ et /i/, soulignées).
Like our last kiss it was perfect we were nervous on the surface And I’m always saying everyday that it was worth it, pain is only relevant if it still hurts I forget like an elephant or we can use a sedative and go back to the day we fell in love just on a first kiss |
En outre, il fait, du mélange des genres sa marque de fabrique, mêlant couplets de rap, refrains chantés lentement et fond sonore doux et posé. Il sait d’autant plus se faire remarquer en mettant son souffle impressionnant au service de chansons, en l’associant à sa technique vocale, comme dans « One », où il tient une note en voix de faucet pendant 17 secondes.
Loop pedal ou loop station: Pédale servant à l’enregistrement de différents éléments dans le but de créer des boucles que l’on peut répéter à l’infini.[6] |
Parfois gêné par des problèmes de régularité dans son jeu (il a parfois tendance à accélérer la cadence lors de prestations live, comme on peut le voir dans une version de « I See Fire » à partir de 4 :58), Ed Sheeran a su faire fi de ses faiblesses et les transformer en qualité. Il est aujourd’hui l’un des seuls artistes de la musique populaire à utiliser une loop pedal, qui lui permet d’enregistrer des parties instrumentales ou vocales en direct afin de les répéter à volonté. L’utilisation de cet outil lui permet en effet de s’assurer d’obtenir un rythme régulier qu’il peut suivre tout au long de sa prestation… à condition que la pédale ne s’arrête pas en cours de route.
Autre exemple de la créativité de l’artiste britannique, « You Need Me, I Don’t Need You » (communément raccourcie à « You Need Me ») est le deuxième single issu de son premier album +. Il a été plutôt bien reçu par le public (bien qu’il ne passe pas sur les chaînes de radio, notamment les chaînes de radio françaises), car il fait partie des titres qui évoluent le plus au fil du temps. Il existe plusieurs versions de cette chanson, autant en enregistrement studio qu’en concert, et c’est là la capacité d’Ed Sheeran à compiler et travailler en patchwork qui est mise en avant. Alors que la version studio présente sur l’album dure 3 minutes et 40 secondes, son interprétation du titre en concert peut durer jusqu’à 24 minutes, entre le montage de l’instrumentation de départ à l’aide de sa pédale d’enregistrement, la performance de la chanson dans sa forme de base, l’ajout de paroles ou de nouvelles voix (instrumentales ou vocales) et la participation du public. En effet, Ed Sheeran étoffe la créativité dont il fait preuve en studio lors de ses concerts, dans la mesure où il capte l’attention du public par la surprise et la nouveauté. En raccrochant aux couplets de base des couplets présents dans des versions antérieures (des démos, telles que la version présente sur le One Take EP), en inventant parfois des paroles sur le moment, ou en y associant des chansons plus ou moins actuelles (par exemple, « Red » de Laid Blak, sorti en 2007), il permet à l’auditeur de parfois découvrir de nouveaux artistes.
Structure rondo-sonate: Structure issue du mélange des structures rondo et sonate. Elle traite le refrain et le couplet comme deux thèmes.[7] |
L’utilisation de la pédale d’enregistrement permet dans ce cas de soutenir ces ajouts, en brodant autour de l’instrumentation originale de « You Need Me », c’est-à-dire en conservant la percussion que l’on appellera « tap and frot » (temps frappés sur le corps de la guitare et contretemps frottés sur les cordes de la guitare), afin d’amplifier progressivement le volume sonore de la chanson, par l’ajout de chœurs et autres éléments de percussion. La structure à base rondo est alors modifiée et s’apparente plus à une structure rondo-sonate.
Un artiste qui tient dans le temps
Divide : entre tradition et innovation :
Outre les chansons douces, Ed Sheeran cherche à se réinventer et à progresser tout en conservant le style si particulier qui l’a fait connaître. Moins connu pour ses chansons plus percutantes, autant dans l’aspect rythmique que dans son flot de paroles ou par la brutalité de ces dernières, il a tout de même su convaincre avec son troisième et dernier album en date, ÷ (Divide), sorti le 3 mars 2017.
S’il est assez peu impliqué politiquement, parce qu’il est selon lui trop peu informé pour avoir un avis éclairé, ne cherchant pas à prêcher à qui que ce soit, comme on le voit d’ailleurs dans « What Do I Know ? », il s’efforce cependant d’être honnête autant que possible. Grâce à cela, les paroles de ses chansons sont parfois crues et la violence de l’émotion dont il fait preuve est assez impressionnante. On retrouve par exemple cette émotion pure dans son nouveau titre « Eraser », dans lequel il critique l’industrie de la musique par les mots : « Ain’t nobody want to see you down in the dumps, ‘cause you’re living your dream, man, that shit should be fun », littéralement « Personne ne veut te voir au fond du trou, mec, tu réalises ton rêve, ça devrait être marrant ». Bien loin d’aimer se plaindre, Ed Sheeran réussit en deux lignes à faire part à son public de l’horreur que peut représenter la célébrité et l’impression d’avoir à porter le poids de l’idole qui représente un modèle. Car même si la célébrité est un choix, elle est bien souvent aussi synonyme de l’abandon de toute vie privée et de l’autorisation de se plaindre et d’aller ne serait-ce qu’un peu moins bien que d’habitude, sous prétexte que l’on est mieux loti que tout le monde. Si l’argent est une source de confort et peut résoudre certains problèmes, il est surtout source de conflits et de jalousies, comme le dit si bien le chanteur britannique : « I chased the picture perfect life, I think they painted it wrong. I think that money is the root of all evil and fame is hell », littéralement : « Je courais après une vie parfaite mais je crois qu’ils s’étaient trompés. L’argent est source de tous les vices, la célébrité n’est qu’enfer. » ou « Family and friends filled with envy when they should be filled with pride », qui signifie : « Amis et famille non pas portés par la fierté mais rongés par la jalousie ».
Le rythme de parole est peut-être plus pauvre sur ce titre, par rapport à des titres rappés comme « You Need Me, I Don’t Need You », « New Man » ou « U.N.I. », mais il est porté, du moins sur la version studio, par l’instrumentation, riche en émotion elle aussi. Le court motif de guitare sèche présent dès l’introduction, le tom basse utilisé à profusion en contretemps, les motifs de chœurs aigus et les brefs mouvements de cordes frottées (violons) aident à créer un fond sonore en tonalité mineure assez agressif et d’une rondeur prenante, enivrante. Il est d’ailleurs intéressant de se focaliser sur la construction de ce titre dans la mesure où, bien qu’on ait un titre basé sur des couplets rappés de manière plutôt monotone, Ed Sheeran parvient à rendre la partie rap (qui pourrait repousser certains) intéressante et mélodique grâce à l’ajout de chœurs reprenant les paroles par moments, tout cela entrecoupé de prechorus chantés, avant d’entrer sur un refrain coincé entre chant, rap et cris. Le passage d’un mouvement à un autre est donc plus équilibré, conduit par la percussion au tom basse (qui joue étrangement le rôle d’une basse continue) et les chœurs, et il permet à l’auditeur de s’imprégner de l’instrumentation pour mieux appréhender les paroles.
Le pont se passe de percussion et repose uniquement sur la ligne de guitare de l’introduction, la guitare rythmique et des chœurs sans paroles, avant d’enchaîner sur le refrain avec un retour de l’instrumentation dans son intégralité. La construction de ce titre s’apparente donc à un empilement d’instruments mêlant voix, percussions, guitares rythmique et mélodique, chœurs et lignes de sons électroniques ; par l’ajout progressif de chacun de ces éléments, un peu à la manière de paires minimales phonétiques, Ed Sheeran crée une évolution sonore qui capte l’attention du public du début jusqu’à la fin. L’artiste fait donc de cette chanson une excellente introduction à son nouvel album, car elle sert de ciment entre +, X (Multiply) et ÷.
Un live qui dépasse et sublime ses albums :
Ed Sheeran offre en concert une prestation à son image : il joue tous les instruments seul sur scène, toujours accompagné de sa pédale d’enregistrement, peu importe la taille de la salle. C’est d’ailleurs comme cela qu’il a pu jouer trois soirs d’affilée à guichets fermés, en juillet 2015, au Wembley Stadium de Londres (qui peut accueillir jusqu’à 90 000 personnes). Ses prestations sont si impressionnantes qu’il a reçu quelques plaintes à un concert dans la ville canadienne de Winnipeg. Quelques personnes dans le public avaient en effet pris contact avec le management du britannique, l’accusant d’être accompagné par un groupe caché sous la scène[8]. Il sait cependant faire fi de ces accusations infondées et prouve que sa créativité est sans limite en accumulant les versions de ses chansons, créant des mashups de chansons dont il a déjà fait des mashups sur les tournées précédentes…
Non content de proposer des titres où il associe version originale et innovation, il fait de ses concerts un vrai moment de bonheur pour son public par un choix réfléchi dans l’ordre des chansons[9] qui permet de divertir son auditoire du début à la fin. Il sait mêler titres connus et moins connus, titres percutants et titres plus doux en piochant dans ses trois albums. Par exemple, il débute sa prestation à l’Accor Hotel Arena de Bercy le 6 avril dernier par « Castle on the Hill », titre connu et très apprécié des fans, et permet au public de participer dès le départ à l’atmosphère du concert. Cette introduction constitue une invitation à chanter avec l’artiste, de la même façon que « Bloodstream » joue sur une participation physique à la mise en scène pendant le concert : Ed Sheeran demande souvent au public d’agiter les bras en rythme avec la chanson, et s’offre alors une vue sur la foule des plus impressionnantes, sublimée par les effets de lumière. Il crée la surprise par les reprises qu’il fait de chansons populaires, comme c’était le cas le 6 avril lorsqu’il a chanté le refrain de « Human » de Rag’n’Bone Man, avant d’enchaîner sur la très appréciée « I See Fire ». Il met en avant dans cette dernière sa maîtrise de la pédale d’enregistrement en recréant sur le vif les différents éléments de percussion ainsi que les chœurs. C’est là l’occasion pour le public de participer, et la foule a alors pour mission de battre le temps et de chanter la voix principale du refrain, encouragée par un « peu importe si vous ne connaissez pas les paroles, chantez quand même quelque chose », pendant que l’artiste s’applique à doubler ses fans avec une deuxième voix sur un écart de tierce. Après une succession de chansons douces, qui permettent au public de se reposer et de se sentir comme suspendu dans le temps, Ed Sheeran revient en général au galop à travers des titres célèbres pour leur caractère entraînant, comme « Sing » et « Shape Of You », afin de catalyser l’énergie du public pour un final explosif, par exemple avec « You Need Me », où toute la tension accumulée lors du concert est évacuée à coups de rap, cris et de guitare frappée à répétition.
Le contraste d’une mise en scène relativement épurée, en comparaison à d’autres artistes, lui permet de seulement illustrer ses chansons par quelques images et quelques plans sur ses expressions ou son jeu instrumental. Sa musique est donc au cœur des concerts, d’autant plus qu’elle se base sur une réelle communication entre l’artiste britannique et son public. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il a au fil des années mis en place une méthode pour faire taire le public : grâce au « universal shush », Ed Sheeran sait se faire comprendre et peut demander le silence afin de donner des explications quant au déroulement du concert ou des instructions quant à la participation du public sur une chanson. Par cela, il crée un dialogue avec son public et évite au possible les cris intempestifs de certains fans un peu trop enjoués. Il montre là sa capacité à se mettre au niveau du public, à s’adapter et divertir les gens le temps d’un concert. Comme il le dit d’ailleurs souvent, « My job is to entertain you and your job is to be entertained. », littéralement : « Mon rôle est de vous divertir et votre rôle ce soir est d’être divertis. ».
Collaborations et autres projets : un artiste « touche à tout » :
Homme du mélange des genres, Ed Sheeran collabore avec des artistes et producteurs d’horizons et de longévité variés : Stormzy (jeune artiste anglais de grime, avec qui il écrit une deuxième version du titre « Shape of You »), Pharrell Williams (artiste et producteur américain renommé, avec qui il collabore pour l’écriture de son titre « Sing »), Beoga (groupe instrumental irlandais avec qui il collabore pour « Galway Girl »). Il travaille aussi régulièrement avec le producteur Rick Rubin, qui a produit les albums de nombreux artistes reconnus, tels que Slayer, Johnny Cash, System of a Down, AC/DC, Jay-Z, Shakira, Adele, etc. En plus de sa contribution au film Le Hobbit : la désolation de Smaug cité plus tôt, il a travaillé sur la bande originale du film Nos étoiles contraires avec la chanson « All of the Stars ». Avec Sir Elton John pour mentor, qui l’a d’ailleurs accompagné sur la scène de Wembley lors de sa tournée mondiale, Ed Sheeran s’inscrit comme un artiste qui voit son futur en tant que producteur, comme il le mentionne en janvier dans un entretien avec le disc-jockey Zane Lowe lors de la promotion de son dernier album. Il suffit de consulter le site de l’ASCAP (American Society for Composers, Authors and Publishers) pour se rendre compte de l’ampleur de l’implication d’Ed Sheeran dans l’industrie de la musique.
Conclusion
En résumé, Ed Sheeran doit sa popularité à une musique qui attire par les différents genres qu’elle propose, mais également à sa capacité à se renouveler tout en conservant son intégrité musicale. Riche d’une longue expérience en tournée, il sait élargir ses horizons par son travail sur différents projets avec les multiples acteurs de l’industrie de la musique et du cinéma. Plus qu’un simple interprète de musique « pop », il a écrit pour des artistes comme James Blunt, Passenger, Eric Clapton, notamment pour le dernier album de ce dernier, sur le titre « I Will Be There » (sous le pseudonyme de « Angelo Mysterioso », en hommage à George Harrison, qui avait collaboré avec Clapton en 1969 sous le nom de « L’Angelo Misterioso »).
Références
– Van de Velde, Ernest, Le Déliateur, éditions Van de Velde, Paris, 2002. 64 pages.
– Danhauser, Adolphe, Théorie de la musique¸ éditions Henry Lemoine¸ Noisy-le-Grand, 1996 [2006]. 196 pages.
– Sheeran, Edward, Butah, Phillip, Ed Sheeran : A Visual Journey, collection « Cassell Illustratred » chez Octopus Publishing/Hachette, Londres, 2014. 208 pages. Illustrations de Phillip Butah.
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– Art d’écouter | Formes: rubrique « Structure rondo » – Jean-Yves Bras: http://www.artdecouter.fr/formes.html.
– Art d’écouter | Glossaire: rubrique « Anacrouse » – Jean-Yves Bras: http://www.artdecouter.fr/glossaire.html.
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– YouTube | Ed Sheeran – “Photograph”: https://www.youtube.com/watch?v=nSDgHBxUbVQ.
– YouTube | Matt Cardle – “Amazing”: https://www.youtube.com/watch?v=sWtP_1lyghM.
– Spotify Web Player | Marvin Gaye – “Let’s Get It On”: https://open.spotify.com/track/4WGENqnUmbv0Ml9NwXMlsD.
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[1] Art d’écouter | Formes : rubrique « Structure rondo » : http://www.artdecouter.fr/formes.html.
[2] Toutes les traductions proposées dans cet article ont été effectuées par mes soins.
[3] Sheeran, E. Buttah, P. A Visual Journey, “Cassell Illustrated”, Octopus Publishing House/Hachette, 2015. p. 24.
[4] Art d’écouter | Glossaire : rubrique « Anacrouse » : http://www.artdecouter.fr/glossaire.html.
[5] Le corps de la guitare acoustique sert de tom basse tandis que les cordes frottées font office de caisse claire et la percussion s’effectue sur le motif suivant : noire, croche, noire pointée, noire.
[6] Wikipedia | Pédale d’effet, rubrique « Loopers, sampleurs » : https://fr.wikipedia.org/wiki/P%C3%A9dale_d%27effet.
[7] Art d’écouter | Formes : rubrique « Structure rondo-sonate » : http://www.artdecouter.fr/formes.html.
[8] Sheeran, E., Jumpers for Goalposts: Live at Wembley Stadium, Blu-Ray, 2015.
[9] Lors du concert du 6 avril 2017, l’ordre complet des chansons était le suivant : « Eraser », « The A Team », « Don’t/New Man », « Dive », « Bloodstream », « Happier », « Galway Girl », « How Would You Feel (Paean) », « Human/I See Fire », « Supermarket Flowers », « Perfect », « Nancy Mulligan »¸ « Thinking Out Loud », « Sing », « Shape Of You », « You Need Me, I Don’t Need You ».