In Platonis Phaedrum Scholia: 253b3-c2

ἐπιτήδευμα, φύσις, φθόνος, ontologie

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Σωκράτης
οἱ δὲ Ἀπόλλωνός τε καὶ ἑκάστου τῶν θεῶν οὕτω κατὰ τὸν θεὸν ἰόντες ζητοῦσι τὸν σφέτερον παῖδα πεφυκέναι, καὶ ὅταν κτήσωνται, μιμούμενοι αὐτοί τε καὶ τὰ παιδικὰ πείθοντες καὶ ῥυθμίζοντες εἰς τὸ ἐκείνου ἐπιτήδευμα καὶ ἰδέαν ἄγουσιν, ὅση ἑκάστῳ δύναμις, οὐ φθόνῳ οὐδ᾽ ἀνελευθέρῳ δυσμενείᾳ χρώμενοι πρὸς τὰ παιδικά, ἀλλ᾽ εἰς ὁμοιότητα αὑτοῖς καὶ τῷ θεῷ ὃν ἂν τιμῶσι πᾶσαν πάντως ὅτι μάλιστα πειρώμενοι ἄγειν οὕτω ποιοῦσι.

Socrate
Ceux qui étaient à la suite d'Apollon et de chacun des autres dieux recherchent, chacun selon les caractéristiques de leur dieu, un aimé de la même nature et quand ils l'ont conquis, en imitant eux-mêmes leur dieu et en convaincant leur aimé et en le dirigeant, ils le conduisent vers le style de vie et la forme du dieu, chacun selon ses possibilités, et ils agissent avec leur aimé sans envie ni malveillance indigne, mais dans l'effort de le rendre le plus possible semblable à eux-mêmes et au dieu qu'ils vénèrent.

Platon, Phèdre, 253b3-253c2

L’amour rend meilleurs: non seulement celui qui aime, mais aussi l’aimé.

Cela signifie, comme on l’a vu, d’adopter le style de vie,l’ἐπιτήδευμα, du dieu que nous avons suivi - qu’il soit Zeus, Héra, ou Apollon… finalement cette liste n’est pas si importante ici. Mais il ne s’agit pas que du style de vie, aussi de la nature: φύσις.

Tout le dispositif consiste, en effet, à essayer de devenir ce qu’on est. Structure apparemment paradoxale, mais tout à fait cohérente avec l’ontologie de Platon: l’essence, la nature véritable (φύσις) est quelque chose qui est avant e de façon plus intense par rapport à son analogue sensible. Une chose n’est pas ce qu’elle est de façon contingente: elle est ce qu’elle est absolument.

Le monde sensible permet donc d’être autre par rapport à ce qu’on est. On s’éloigne de sa propre essence.

Le problème est connu: il est difficile de mettre ensemble l’essence avec le devenir. Il est donc évident que le monde sensible, caractérisé par le devenir, ne peut pas être constitué d’essences qui, par définition, sont stables et immuables.

L’essence des êtres humains est définie par leurs âmes, ou, plus précisément, par ce que sont leurs âmes dans l’hyperouranion. Dans la vie sensible on devient autre chose. L’amour fait rapprocher de la véritable essence et nature. L’amoureux s’en rapproche car il voit son essence dans l’aimé. Mais en même temps il essaie d’en rapprocher l’aimé. Car si l’aimé rappelle le dieu qu’il a suivi, lui aussi il ne l’est pas, car il est dans le monde sensible. L’effort de l’amoureux sera donc de faire devenir, pour autant que possible, l’aimé ce qu’il est.

À souligner le fait que cette dynamique démontre que les discours précédents avaient tort: il ne peut pas y avoir d’envie (φθόνος) ou de malveillance en amour.

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