In Platonis Phaedrum Scholia: 252a1-10

Évangiles

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Σωκράτης
ὅθεν δὴ ἑκοῦσα εἶναι οὐκ ἀπολείπεται, οὐδέ τινα τοῦ καλοῦ περὶ πλείονος ποιεῖται, ἀλλὰ μητέρων τε καὶ ἀδελφῶν καὶ ἑταίρων πάντων λέλησται, καὶ οὐσίας δι᾽ ἀμέλειαν ἀπολλυμένης παρ᾽ οὐδὲν τίθεται, νομίμων δὲ καὶ εὐσχημόνων, οἷς πρὸ τοῦ ἐκαλλωπίζετο, πάντων καταφρονήσασα δουλεύειν ἑτοίμη καὶ κοιμᾶσθαι ὅπου ἂν ἐᾷ τις ἐγγυτάτω τοῦ πόθου: πρὸς γὰρ τῷ σέβεσθαι τὸν τὸ κάλλος ἔχοντα ἰατρὸν ηὕρηκε μόνον τῶν μεγίστων πόνων.

Socrate
Parce qu'elle ne se lasse pas de vouloir la beauté, et qu'elle ne lui préfère rien d'autre au monde, mais elle abandonne mères, frères et amis et si son patrimoine est ruiné par négligence, elle s'en fiche, et en méprisant les règles et les manières de bonne conduite dont elle se vantait, elle est esclave et elle est prête à dormir n'importe où soit le plus près de son désir; outre à le vénérer celui qui a la beauté, elle a découvert en lui le seul médecin de ses plus grands douleurs.

Platon, Phèdre, 252a1-252a10

L’amour détermine des comportements qui vont contre le bon sens commun. C’est ce que tout le monde sait, c’est ce qui était au centre des deux premiers discours qui, justement pour cette raison, condamnaient les amoureux. L’amoureux s’en fiche de tout ce qui compte normalement pour la société: les biens, la famille, les amis. L’amoureux, comme le philosophe, n’est pas de ce monde: il regarde ailleurs et il est donc inadéquat pour le monde d’ici. Mais cette inadéquation est le résultat du fait que l’amoureux fait partie d’un monde meilleur.

C’est un topos fondamental, qu’on retrouve par ailleurs dans d’autres contextes - que l’on pense aux Évangiles, par exemple, et à l’idée que ceux qui sont faits pour le monde de Dieu ne sont pas à l’aise dans le monde d’ici: les derniers seront les premiers. L’amoureux, comme le philosophe, ne fonctionne pas.

L’âme amoureuse cherche la beauté et elle ignore tout le reste. Cette folie apparente est en réalité la seule rationalité possible, car la beauté est la chose la plus importante. L’âme sait que ce n’est pas une question de désir, mais une question de survie: la beauté est le seul médecin possible, c’est la seule chose qui compte vraiment. Tout le reste, tout ce qui semble important pour les autres est en réalité inutile, stupide, vain - encore une fois les résonances qu’on retrouvera dans les Évangiles sont évidentes.

Évangiles scholia