In Platonis Phaedrum Scholia: 251a2-9

δεῖμα, ἀρτιτελής, δεινός, φρίσσω

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Σωκράτης
ὁ δὲ ἀρτιτελής, ὁ τῶν τότε πολυθεάμων, ὅταν θεοειδὲς πρόσωπον ἴδῃ κάλλος εὖ μεμιμημένον ἤ τινα σώματος ἰδέαν, πρῶτον μὲν ἔφριξε καί τι τῶν τότε ὑπῆλθεν αὐτὸν δειμάτων, εἶτα προσορῶν ὡς θεὸν σέβεται, καὶ εἰ μὴ ἐδεδίει τὴν τῆς σφόδρα μανίας δόξαν, θύοι ἂν ὡς ἀγάλματι καὶ θεῷ τοῖς παιδικοῖς.

Socrate
Celui qui est bien initié, par contre, qui a beaucoup vu les choses qui sont dans le passé, lorsqu'il voit une image divine ou une forme de corps qui rappellent bien la beauté, d'abord il frémit et il est pris par les frayeurs du passé, ensuite en la voyant il la vénère comme un dieu, et s'il ne craignait pas la renommée de fou complet, il offrirait même ses enfants comme offrande à un dieu

Platon, Phèdre, 251a2-251a9

Voici l’opposition: d’une part les non initiés et corrompus; de l’autre ceux qui sont initiés correctement (ἀρτιτελής). Cette initiation correcte correspond en réalité au fait d’avoir bien vu les “choses du passé”, ces choses étant évidemment les idées, les essences, les choses qui sont. Ce sont donc toujours les âmes qui ont participé le plus au cortège des dieux dans l’hyperouranion qui arrivent à être supérieures aux autres dans le monde sensible.

Ces âmes donc, en voyant quelque chose de beau, comme par exemple un beau corps, sont capables de se rappeler clairement de la beauté. Cela détermine des réactions violentes. Commence ici toute une phénoménologie de l’amour: tout ce qui arrive à l’amoureux, qui le touche physiquement, qui le trouble, qui le met dans des états de souffrance, d’extase, de perte de contrôle. Cette phénoménologie avait été liée, dans les deux discours précédents, à une critique sévère de l’irrationalité due à l’amour. Ici ces réactions sont expliquées en lien avec la connaissance des idées. C’est cette connaissance qui est exagérée pour les être humains et qui donc les trouble. Mais ce trouble est signe d’un dépassement et non d’un abaissement.

Et les voilà donc ces réactions: d’abord il frémit (φρίσσω) car il se rappelle des frayeurs (δεῖμα) du passé; lors du cortège des dieux, la vue de l’Être est tellement éclairante qu’elle est violente, elle fait peur. On revient à l’ambiguïté de termes comme δεινός: terrible, effrayant, horrible, mais en même temps sublime, car l’aspect terrible dérive du fait qu’il s’agit de quelque chose qui dépasse les limites humaines.

Et en effet, dès que le lien vers l’idée de beauté est fait (dès qu’il la voit, προσορῶν), la frayeur se transforme en vénération. L’opposition avec le comportement du non initié se fait en opposant chaque terme: le non initié n’a pas peur, l’initié est pris par la frayeur, le non initié ne vénère pas la beauté, l’initié la vénère. Et finalement le non initié, devant la beauté, recherche son plaisir, copule et sème des enfants partout (παιδοσπορεῖν); l’initié, au contraire est prêt à sacrifier ses propres enfants au dieu.

δεῖμα, ἀρτιτελής, δεινός, φρίσσω scholia