In Platonis Phaedrum Scholia: 247e2-4
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Σωκράτης
καὶ τἆλλα ὡσαύτως τὰ ὄντα ὄντως θεασαμένη καὶ ἑστιαθεῖσα, δῦσα πάλιν εἰς τὸ εἴσω τοῦ οὐρανοῦ, οἴκαδε ἦλθεν.
Socrate
et quand, de la même manière, elle a contemplé les autres êtres véritables et qu'elle s'en est nourrie, elle plonge à nouveau au milieu du ciel et revient à la maison.
Platon, Phèdre, 247e2-247e4
La fin de la contemplation correspond au retour à la maison. L’hyperouranion n’est pas la maison de l’âme, c’est un lieu où l’âme peut voyager.
Rappelons-nous que le sujet ici, au moins du point de vue purement grammatical, est encore l’intelligence du dieu (θεοῦ διάνοια). Cette intelligence est donc associée profondément à l’âme, jusqu’au point de se confondre avec elle. Car ici il est évident que c’est de l’âme entière et non seulement de l’intelligence qu’il est question. L’âme a voyagé jusqu’à l’hyperouranion, grâce à l’intelligence elle a pu voir les véritables essences et une fois qu’elle les a toutes vues elle peut retourner à la maison.
L’âme appartient au monde. Elle est à l’intérieur de l’univers. Elle peut sortir - avec peine et difficulté -, mais ensuite il faut revenir. La matérialité redevient centrale.
L’intelligence divine est encore une fois mélangé avec cette matérialité. On le constate aussi, encore une fois, par les verbes employés: après avoir contemplé, - θεάομαι, le verbe de l’abstraction, même s’il est finalement un verbe de sensation - elle se nourrit (ἑστιάω) de ces essences. Avant on avait utilisé le verbe τρέφω. ἑστιάω est différent: il renvoie à l’idée du foyer (ἑστία) et signifie donc être à table, recevoir à table ou fêter en mangeant. La maison est donc très présente dans ce passage: la conclusion du voyage - comme pour Ulysse - est le retour à la maison (οἴκαδε).
Certes c’est la structure typique de la réflexion: la sortie de soi pour revenir à soi. C’est la structure attaquée par Lévinas qui la décrit comme réduction violente de l’Autre par et sur le Même. Mais ce retour à la maison est aussi le témoignage d’une co-appartenance. Finalement l’âme avec son intelligence divine appartient au monde qu’elle prétend observer.