In Platonis Phaedrum Scholia: 235c2-4

συγγραφεύς

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Σωκράτης
νῦν μὲν οὕτως οὐκ ἔχω εἰπεῖν: δῆλον δὲ ὅτι τινῶν ἀκήκοα, ἤ που Σαπφοῦς τῆς καλῆς ἢ Ἀνακρέοντος τοῦ σοφοῦ ἢ καὶ συγγραφέων τινῶν.

Socrate
Maintenant, comme ça, je ne sais pas le dire: mais il est clair que j'ai entendu quelque chose ou de la belle Sappho, ou du sage Anacréon ou de quelques autres écrivains.

Platon, Phèdre, 235c2-235c4

Socrate avoue le flou qui caractérise son affirmation. Ou plutôt il l’assume. Maintenant (νῦν), ici sur deux pieds, je ne peux pas le dire. Il accepte donc la critique de Phèdre. Mais il y a quelque chose qui reste vrai: il est clair que je l’ai entendu, que ces choses ont été dites - ou mieux, écrites.

Les deux noms que Socrate cite servent comme des noms génériques: il a parlé d’hommes et de femmes du passé et il cite donc Sappho - la poétesse par antonomase - et Anacréon - pour ne pas dire Homère?

Ce que Socrate dit est donc que les choses que Lysias dit dans son discours à propos de l’amour n’ont rien de “nouveau”. Peut-être plus précisément: on ne peut jamais rien dire de nouveau, tout a déjà été dit. L’amour est une thématique qui se prête particulièrement à ce type de réflexion: ce que nous en pensons, ce que nous pouvons en dire, tous les arguments brillants que nous pouvons concevoir sont déjà là, déjà écrits, déjà pensés, déjà dits. Et c’est justement pour cette raison que nous pouvons les penser. Car penser ne signifie pas inventer ex nihilo quelque chose, mais plutôt récupérer quelque chose qui est déjà là.

Socrate est en train de faire référence ici, plus particulièrement, au topos de l’amour qui rend fou qui était au centre de l’argument de Lysias, voilà pourquoi il cite des poètes tels que Sappho et Anacréon.

Mais la question est de savoir où se trouvent ces idées déjà pensées, déjà dites. Et Socrate le précise: il sait qu’il a entendu ces discours par des écrivains (συγγραφεύς). Les a-t-il entendus, donc, ou les a-t-il plutôt lus? Dans le flou total de sa réponse, la seule chose paradoxalement certaine est que seul ce qui est écrit peut ensuite être pensé.

συγγραφεύς scholia