In Platonis Phaedrum Scholia: 231a8-231b9

ἔτι, σκοπέω

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Φαῖδρος
ἔτι δὲ οἱ μὲν ἐρῶντες σκοποῦσιν ἅ τε κακῶς διέθεντο τῶν αὑτῶν διὰ τὸν ἔρωτα καὶ ἃ πεποιήκασιν εὖ, καὶ ὃν εἶχον πόνον προστιθέντες ἡγοῦνται πάλαι τὴν ἀξίαν ἀποδεδωκέναι χάριν τοῖς ἐρωμένοις: τοῖς δὲ μὴ ἐρῶσιν οὔτε τὴν τῶν οἰκείων ἀμέλειαν διὰ τοῦτο ἔστιν προφασίζεσθαι, οὔτε τοὺς παρεληλυθότας πόνους ὑπολογίζεσθαι, οὔτε τὰς πρὸς τοὺς προσήκοντας διαφορὰς αἰτιάσασθαι: ὥστε περιῃρημένων τοσούτων κακῶν οὐδὲν ὑπολείπεται ἀλλ᾽ ἢ ποιεῖν προθύμως ὅτι ἂν αὐτοῖς οἴωνται πράξαντες χαριεῖσθαι.

Phèdre
Et encore, ceux qui aiment confrontent les dommages subis à cause de l'amour et le bien qu'ils ont fait et ajoutant la peine qu'ils se sont donnée considèrent qu'ils ont déjà depuis longtemps donné aux aimés suffisamment d'attentions. Ce n'est pas propre à ceux qui n'aiment pas, en revanche, d'alléguer d'avoir négligé leurs affaires pour cette raison, ni de tenir compte des peines passées, ni de considérer les aimés responsables pour des différends avec leur familles: de cette manière, enlevés ces maux, il ne leur reste rien d'autre que faire avec enthousiasme ce qu'ils croient fera plaisir aux aimés.

Platon, Phèdre, 231a8-231b9

ἔτι: encore. La juxtaposition est à l’œuvre. Les arguments donnés par Lysias ne sont pas reliés par des structures logiques, ils sont juste mis les uns après les autres, connectés par un “et encore”. Car ce qui est nécessaire c’est de pouvoir les compter, ces arguments. Combien il y en a en faveur? Combien contre? Et la structure est toujours la même: l’opposition. Ceux qui aiment font ceci, ceux qui n’aiment pas font cela.

Ceux qui aiment analysent attentivement et confrontent. C’est étrange que dans leur manque de contrôle et de maîtrise de soi, dans leur ἐπιθυμία, ils arrivent quand même à être si rationnels et à analyser, examiner (σκοπέω). σκοπέω est le verbe utilisé pour l’enquête scientifique: examiner les étoiles, ou le soleil, par exemple. On imagine que cette attitude rationnelle et scientifique arrive une fois que le désir n’est plus là. Et alors l’aimant analyse et compte - certes, c’est un aimant peint par Lysias, il reste, même si amoureux, un homme d’affaires. Et il compte: ce qu’il a fait de bien mais aussi, dans son cas de personne amoureuse, les peines qu’il a souffert. Les peines peuvent aussi êtres calculées, comptées, comptabilisées dans ce calcul qui consiste à établir presque légalement les intérêts de chacun. Les peines sont de la monnaie et elles pèsent sur la balance. Or les non amoureux ne peinent pas. Ils font d’abord leurs intérêts et donc dans le décompte final, leur “faire du bien” coûtera moins cher que celui des amoureux.

Les peines sont donc comme une taxe sur la valeur ajoutée, payée par les amoureux mais non payée par les non amoureux. C’est donc un calcul de marché que fait Lysias ici.

ἔτι, σκοπέω scholia