In Platonis Phaedrum Scholia: 229b7-c4
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Φαῖδρος
ἆρ᾽ οὖν ἐνθένδε; χαρίεντα γοῦν καὶ καθαρὰ καὶ διαφανῆ τὰ ὑδάτια φαίνεται, καὶ ἐπιτήδεια κόραις παίζειν παρ᾽ αὐτά. Σωκράτης
Φαῖδρος
οὐ πάνυ νενόηκα: ἀλλ᾽ εἰπὲ πρὸς Διός, ὦ Σώκρατες, σὺ τοῦτο τὸ μυθολόγημα πείθῃ ἀληθὲς εἶναι;
Phèdre
Peut-être justement ici? Car l'eau semble belle, pure et transparente, faite juste pour que les filles viennent y jouer. Socrate
Pas ici, mais deux ou trois stades plus bas, là où nous traversons pour aller au temple d'Aarthemis la chasseuse: et dans ce lieu, quelque part, il y a un autel dédié à Borée.
Phèdre
Je ne vois pas trop: mais dis donc, par Zeus, Socrate, toi tu crois que ce mythe est vrai?
Platon, Phèdre, 229b7-229c4
La description du locus amoenus continue. Chiare fresche e dolci acque dira Pétrarque. Puisque l’eau ici est belle, pure et transparente, c’est peut-être ici même que le mythe a eu lieu. Mais cette beauté est en réalité un appât dans le mythe: c’est ce qui attire Orithye et rend possible l’enlèvement. La beauté est-elle un piège?
Non, pas ici mais plus bas. Socrate donne une distance approximative, deux ou trois stades. Un stade correspond à environ 150 mètres. Le mythe a eu lieu 300 ou 400 mètres plus bas et le lieu est marqué par la présence d’un autel à Borée. Ces lieux de campagne ne sont pas vidés de la présence humaine. L’architecture, les statues, les temples, les dieux marquent une unité de ce qu’on pourrait appeler nature et culture. Mais parler de cette polarité serait probablement trompeur car cela impliquerait déjà la possibilité d’une séparation. Les frontières sont poreuses et mêmes les murs de la ville ne semblent pas être étanches.
Le lieu précis n’est pas connu par Phèdre qui revient donc à parler du mythe qui l’habite. Le lieu est défini par le mythe, encore une fois dans une continuité entre espace et discours.
La question devient donc de savoir si ce mythe est vrai. Et donc il est question de savoir justement s’il a eu lieu. Mais il est aussi et surtout question de comprendre ce qu’est la vérité.
Plusieurs éléments donc: un espace matériel, une narration mythique (μυθολόγημα), le λόγος, l’architecture, les distances, les relations entre deux points de l’espace (ici et là-bas), les relations entre l’ensemble de l’espace et des narrations, les relations entre mythes, religions, architectures… Tous ces éléments font le lieu. Tous ces éléments contribuent dans l’émergence du sens. Leurs définitions et leurs délimitation est finalement artificielle car ils mettent en place une série de conjonctures qui ne peuvent être démêlées que par après-coup, avec des cristallisations arbitraires.
