In Platonis Phaedrum Scholia: 228c5-d5
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Φαῖδρος
ἐμοὶ ὡς ἀληθῶς πολὺ κράτιστόν ἐστιν οὕτως ὅπως δύναμαι λέγειν, ὥς μοι δοκεῖς σὺ οὐδαμῶς με ἀφήσειν πρὶν ἂν εἴπω ἁμῶς γέ πως.
Σωκράτης
πάνυ γάρ σοι ἀληθῆ δοκῶ.
Φαῖδρος
οὑτωσὶ τοίνυν ποιήσω. τῷ ὄντι γάρ, ὦ Σώκρατες, παντὸς μᾶλλον τά γε ῥήματα οὐκ ἐξέμαθον: τὴν μέντοι διάνοιαν σχεδὸν ἁπάντων, οἷς ἔφη διαφέρειν τὰ τοῦ ἐρῶντος ἢ τὰ τοῦ μή, ἐν κεφαλαίοις ἕκαστον ἐφεξῆς δίειμι, ἀρξάμενος ἀπὸ τοῦ πρώτου.
Phèdre
Vraiment il est mieux pour moi de parler comme je le peux, car il me semble que jamais tu ne me laisseras tranquille avant que je parle d'une manière ou d'une autre
Socrate
Tu as une idée juste de moi.
Phèdre
Je le ferai donc. En réalité, Socrate, je n'ai pas appris précisement tout ce qui a été dit; par contre je suis capable de résumer par points dans l'ordre plus ou moins le sens de l'ensemble, en quoi il a dit diffèrent celui qui aime et celui qui n'aime pas, en commençant du début.
Platon, Phèdre, 228c5-228d5
Il faut finalement céder au désir de Socrate. Le jeu érotique continue, les deux se taquinent, s’excitent avec ces échanges de promesses et refus. Intéressant que dans ces répliques apparemment banales, il soit à deux reprises question de vérité: ἀληθῶς et ἀληθῆ. Il s’agit certes juste d’expressions faites en grec: “il faut vraiment que je parle”, “tu me connais vraiment”. Mais la référence à la vérité reste importante. La vérité grecque qui consiste à dévoiler ce qui est tombé dans l’oubli: l’alpha privatif devant le verbe λανθάνω, oublier, passer inaperçu.
Il y a des choses cachées, oubliées, inaperçues et il faut les trouver, les découvrir. Comme par exemple le mensonge de Phèdre - ou plutôt les mensonges: il a dit qu’il ne saura pas répéter le discours et Socrate lui a démontré pourquoi il ne pouvait pas le croire, il dit maintenant qu’il donnera un résumé général du discours et des ses principaux passages et encore une fois Socrate ne se laissera pas avoir.
Phèdre affirme qu’il est capable de restituer la pensée (διάνοια) de Lysias, ou plutôt, la pensée du discours. La question se pose encore de savoir qui pense: est-ce Lydias? Est-ce le discours? Est-ce Phèdre qui le répète? Socrate qui l’écoute? Où se trouve le sens? Comment est-il produit? Le fait de pouvoir résumer les arguments semble être une preuve d’appropriation de la pensée: si Phèdre en est capable, cela signifie qu’il a appris la leçon et qu’il s’est approprié la pensée du maître. Ou alors serait-il un meilleur élève s’il était capable de restituer l’entièreté du discours, mot à mot, par coeur?