In Platonis Phaedrum Scholia: 242d5-7

εὐήθης, δεινός, ἀσεβής

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Σωκράτης
εὐήθη καὶ ὑπό τι ἀσεβῆ: οὗ τίς ἂν εἴη δεινότερος;
Φαῖδρος
οὐδείς, εἴ γε σὺ ἀληθῆ λέγεις.

Socrate
Stupide et par dessus sacrilège: y a-t-il quelque chose de plus horrible?
Phèdre
Rien, si tu dis la vérité.

Platon, Phèdre, 242d5-242d7

Socrate prend à la lettre la question de Phèdre. Il vient de demander πῶς δή; Comment? Comment est-ce horrible ce que nous venons de dire? En quoi est-ce horrible?

Socrate l’explique en neutralisant le sens positif de δεινός. Car si horrible peut devenir sublime c’est lorsque la démesure implique le dépassement de ses propres limites. C’est le sens de l’expression ‘σοφὸς καὶ δεινός ἀνήρ’; un homme terrible et intelligent, à savoir un homme terriblement intelligent. Le terrible dérive du fait que l’intelligence dépasse les limites de l’humain.

C’est cette expression que Socrate a en tête lorsqu’il caractérise le discours comme εὐήθη: stupide. εὐήθης neutralise le sens positif possible de δεινός. εὐήθης vient de εὐ, bon, et ἦθος, coutume. Être εὐήθης signifie être gentil, mais gentil dans le sens mauvais du terme: simple, simplet, gentil garçon, bête. εὐήθης est l’inverse de δεινὸς: l’homme qui transgresse la règle pour se transcender est un bad boy, sa méchanceté devient son intérêt. L’εὐήθης est un gentil garçon incapable de transgresser la règle et qui est donc ‘borné’.

Un terme négatif comme δεινός peut devenir positif et un terme positif comme εὐήθης peut devenir négatif. On peut être horrible parce que la démesure devient un dépassement et on peut être bête parce que la mesure rend borné.

Le discours n’est pas horriblement intelligent, donc, il est borné, bête. Et s’il est δεινός c’est juste parce qu’il dépasse - stupidement - la mesure. Il est blasphématoire, sacrilège: ἀσεβής.

Il n’y a donc rien de plus horrible: il a tous les côtés négatifs possibles. Le discours a péché de ὕβρις sans pour autant atteindre un dépassement des limites. Il est borné et démesuré et en plus avec sa démesure il a insulté les dieux.

On peut donc être démesuré tout en étant borné: c’est une démesure de façade, une démesure à la mode, celle de Lysias. Et en effet Socrate a dit que de cette horreur c’est Phèdre qui en est le responsable. Lui et son amour branché pour les discours.

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