In Platonis Phaedrum Scholia: 246b1-5
Billet précédentLire les autres billets de la série
Σωκράτης
καὶ πρῶτον μὲν ἡμῶν ὁ ἄρχων συνωρίδος ἡνιοχεῖ, εἶτα τῶν ἵππων ὁ μὲν αὐτῷ καλός τε καὶ ἀγαθὸς καὶ ἐκ τοιούτων, ὁ δ᾽ ἐξ ἐναντίων τε καὶ ἐναντίος: χαλεπὴ δὴ καὶ δύσκολος ἐξ ἀνάγκης ἡ περὶ ἡμᾶς ἡνιόχησις.
Socrate
Tout d'abord pour nous, le cocher conduit les deux animaux, et des deux chevaux un est bon et beau et de bonne race, l'autre tout le contraire et de race opposée: la conduite de notre attelage est donc nécessairement difficile et pénible.
Platon, Phèdre, 246b1-246b5
La composition des forces en jeu dans l’âme rend plus ou moins facile la conduite: ἡνιόχησις. Le cocher (ἡνίοχος), celui qui conduit (ἡνιοχέω), doit s’occuper de donner la direction: si les deux vecteurs ont la même direction, évidemment, la conduite sera facile. Lorsque les forces ne sont pas en accord, conduire va impliquer une négociation entre ces deux forces et leurs directions. Cela va donc être compliqué: difficile et pénible.
En même temps, il faut souligner que, lorsque les forces vont dans la même direction - et c’est le cas des âmes des dieux - le rôle du cocher devient moins fondamental. Cette troisième force qui fait l’équilibre entre les deux premières est vraiment nécessaire seulement dans le cas d’un conflit entre celles-ci.
Une autre structure à remarquer: les chevaux de la métaphore sont opposés. Un est de bonne race, l’autre “l’opposé” (ὁ δ᾽ ἐξ ἐναντίων τε καὶ ἐναντίος). Les deux forces en jeu sont donc caractérisées comme l’une l’opposé de l’autre. Ce qui - on le verra - n’est pas complètement vrai; si les deux forces étaient réellement opposées elles s’annuleraient. Il serait plus précis de dire qu’il y a potentiellement un nombre illimité de forces possibles (comme les vecteurs) et que leurs combinaisons donnent toujours des forces résultantes complexes.
Cela serait une façon pour sortir de l’essentialisme opposant bien et mal: le beau et bon (καλός τε καὶ ἀγαθὸς) d’un côté et le laid et mauvais de l’autre. Mais certainement ce n’est pas une idée très proche du point de vue de Platon.