In Platonis Phaedrum Scholia: 232e2-233a5

φιλία, μνημεῖον

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Φαῖδρος
καὶ μὲν δὴ τῶν μὲν ἐρώντων πολλοὶ πρότερον τοῦ σώματος ἐπεθύμησαν ἢ τὸν τρόπον ἔγνωσαν καὶ τῶν ἄλλων οἰκείων ἔμπειροι ἐγένοντο, ὥστε ἄδηλον αὐτοῖς εἰ ἔτι τότε βουλήσονται φίλοι εἶναι, ἐπειδὰν τῆς ἐπιθυμίας παύσωνται: τοῖς δὲ μὴ ἐρῶσιν, οἳ καὶ πρότερον ἀλλήλοις φίλοι ὄντες ταῦτα ἔπραξαν, οὐκ ἐξ ὧν ἂν εὖ πάθωσι ταῦτα εἰκὸς ἐλάττω τὴν φιλίαν αὐτοῖς ποιῆσαι, ἀλλὰ ταῦτα μνημεῖα καταλειφθῆναι τῶν μελλόντων ἔσεσθαι.

Phèdre
Et en plus plusieurs amoureux désirent le corps avant de connaître le caractère et d'être familiers avec les autres qualités, ainsi qu'il n'est pas clair s'ils voudront être tes amis après que ce désir sera fini; pour les non amoureux, en revanche, qui étaient tes amis même avant d'obtenir tes faveurs, il n'est pas probable que, suite au plaisir reçu, leur amitié diminue, mais plutôt ces faveurs restent comme signes pour rappeler les joies futures.

Platon, Phèdre, 232e2-233a5

Le rôle du rapport sexuel est thématisé explicitement ici et opposé à l’amitié. Paradoxalement c’est celui qui n’est pas amoureux qui est ami et qui ne désire pas forcement - ou pas trop ardemment - le rapport sexuel. La question du principe de raison suffisante se pose à nouveau: quels sont les intérêts des non amoureux? Pourquoi le non amoureux désire-t-il une relation avec celui qu’il n’aime pas? Lysias continue à jouer sur l’ambigüité. On aurait pu imaginer que le non amoureux voulait finalement une relation sexuelle sans un grand engagement sentimental, mais ici on dit l’inverse: ce sont les amoureux qui désirent en premier lieu le sexe et une fois que leur désir est assouvi, plus rien ne restera pour garantir la relation. Ceux qui n’aiment pas sont d’abord des amis.

Le sexe a cependant un rôle fondamental: car c’est le plaisir sexuel qui pousse les non amoureux à rester dans la relation. Le plaisir obtenu est une promesse de plaisirs futurs, une promesse déjà maintenue, et donc une mémoire: Lysias utilise le mot μνημεῖον, un signe pour se rappeler de quelque chose, mais ici, ce dont on veut se rappeler, ce sont les plaisirs à venir.

L’irrationalité des amoureux les empêche de voir le futur et de comprendre qu’ils peuvent jouir encore, profiter encore de l’aimé. Le désir assouvi disparaît. Les non amoureux savent jouir avec plus de contrôle, ils maîtrisent leur plaisir et ils s’en servent pour planifier d’autres plaisirs dans le futur.

C’est une sorte de tempérance, celle des non amoureux, qui leur permet de rester toujours dans une approche rationnelle, même quand ils sont au lit.

φιλία, μνημεῖον scholia