Ce qui pourrait être autrement: introduction
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Depuis près d’un an, je n’arrive plus à écrire de billets de blogue.
J’aime cette forme d’écriture et j’ai essayé de comprendre les raisons de ce blocage. Je crois qu’il y en a fondamentalement quatre:
L’(auto)censure. Nous vivons dans un monde qui demande le consensus. Surtout depuis un an. Si l’on n’est pas d’accord, on est conspirationniste, négationniste, trumpiste… Il faut faire attention à ce que l’on dit pour éviter d’être associé à l’une de ces étiquettes. Il y va de sa propre crédibilité, d’abord, mais même plus que cela: nous voyons autour des gens qui se font mettre à pied pour avoir prononcé un mot.
Le style. C’est lié à la première considération, évidemment: le format blogue n’est pas un format scientifique. Ce sont des prises de parole qui ne se doivent pas forcément d’être tout à fait rigoureuses, dont l’argumentation peut être parfois boiteuse. Or quelle est la place d’un tel format dans le clavier d’un “chercheur”? Il m’est déjà arrivé de recevoir une évaluation de mes travaux scientifiques citant mon blogue pour démontrer mon manque de rigueur.
L’impératif d’originalité. On se sent obligé de dire quelque chose d’original, d’inédit et en même temps d’intelligent. Or il est assez difficile de remplir ces trois conditions. On écrit tellement qu’il est impossible de ne pas répéter quelque chose que quelqu’un d’autre a déjà dit, probablement mieux. Et si ce que l’on dit est original, on a des chances que cela ne soit pas intelligent.
La forme d’écriture dictée par WordPress. L’implémentation en base de données, l’interface, la lourdeur du dispositif technique… ne me conviennent plus.
Je veux trouver une issue à ce blocage d’écriture et je me propose de lancer une série de billets. Je ne promets rien sur la fréquence que je souhaite cependant la plus haute possible.
Résoudre le problème du format n’est pas compliqué: je passe le blogue en statique, je travaille sur des fichiers markdown sur un repo git et ensuipe je produis le html avec un générateur de sites statiques, Jekyll pour le moment (merci à Antoine Fauchié pour les conseils).
Il faut imaginer un format de billets… Il s’agira de billets probablement courts, qui présentent une pensée débridée et non censurée, sans doute pas rigoureuse, peut-être paradoxale, peut-être provocatrice, j’espère pas lisse, problématique et - c’est mon plus grand souhait - libre.
Il s’agira de billets anarchistes: parce que je suis anarchiste, parce que je pense que toutes les autres positions politiques sont tout simplement délirantes, parce que je ne l’ai jamais affirmé avec assez de force, parce que je suis mécontent de mon manque de militantisme depuis quelques années, parce qu’en lisant Anne Archet et Umanità nova j’ai pensé que peut-être une activité politique était encore possible à l’aide d’un clavier.
La beauté de l’anarchisme est qu’il invite à une pensée véritablement radicale, qui se pose la question: et si tout pouvait être autrement? Au lieu de partir d’un “réalisme” étriqué et stupide - mais comment serait-il possible de changer ça? Essayons de boucher quelques trous… -, l’anarchisme demande à penser le monde comme il devrait être. C’est le rôle de la pensée, sa fonction première.
Tout pourrait être autrement. On peut et on doit penser cet autrement.