Ce qui pourrait être autrement: données personnelles
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Les enjeux de l’utilisation de nos données personnelles par les grandes entreprises ne sont pas du tout compris pour le moment. Quelqu’un - je ne sais plus qui, désolé - faisait une analogie entre le rapport des Premières Nations au territoire et notre rapport à nos données. Les Premières Nations n’avaient pas la notion de propriété du territoire car le territoire était considéré comme une ressource commune dans laquelle on circulait librement: on ne pouvait pas le “posséder” et donc il n’avait pas une “valeur” (quelle belle idée). Lorsque les européens arrivèrent et commencèrent à l’occuper parfois en donnant en échange des petites choses, les Premières Nations ne se rendirent pas compte de ce qui se passait: c’était comme donner quelque chose sans valeur - de la terre qui reste commune - en échange de quelque chose de bien concret, une couverture, par exemple. Mais en réalité les européens était en train de changer le modèle et d’introduire la notion de valeur et de propriété pour le territoire.
Nous faisons la même chose aujourd’hui: nos données - qui dans notre perceptions ne valent rien - contre des services bien cools. Et on voit émerger l’adagio selon lequel “je n’ai rien à cacher, donc pourquoi ça me poserait un problème?” Ça pose problème parce que c’est pas équilibré: nos données ont beaucoup de valeur dans le modèle inventé et imposé par les GAFAM et sont l’or d’aujourd’hui. Nos actions son transformées en argent. Les services cools sont en réalité juste une excuse pour produire des données, comme une balle qu’on lance à un chien pour le faire courir.
Le pouvoir économique et politique que nous accordons aux GAFAM devient sans bornes. Désormais elles induisent nos actions pour que nous produisions plus de données. Clique ici, swipe là, aime ça, like ci, regarde un documentaire sur les GAFAM - oui, Netflix fait aussi ça, ils peuvent même se permettre de nous donner à voir leur propre autocritique.
C’est la raison pour laquelle les applications mobiles pour traquer la Covid et, encore pire, le passeport sanitaire sont inacceptable: cela signifie déléguer à Apple et Google la gestion des données personnelles de santé. Les enjeux politiques sont énormes: d’une part le fait qu’on ne devrait pas accepter le traçage de données biométrique par les institutions - mais ça c’est une autre histoire beaucoup plus complexe - et de l’autre que ce qu’on propose maintenant c’est de le faire faire à 2 compagnies privées.
Comme pour les Premières Nations: deux ou trois compagnies sont en train d’occuper nos territoires et d’imposer leur modèle - ultracapitaliste - qui change le sens même de ce que nous sommes en tant que sociétés, toutes nos valeurs, toute l’organisation du monde. Nous devenons les “usagers”, ou pour être plus précis les engrenages du mécanisme de production d’argent de ces compagnies. La seule manière pour résister c’est de ne pas se faire utiliser - et donc de tout simplement les éviter.
Mais je suis plutôt pessimiste: notre culture et nos sociétés sont déjà ravagées.
