Ce qui pourrait être autrement: contre Zoom

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Depuis un an nos institutions - je parle de l’université, mais cela est probablement vrai dans tous les autres secteurs - nous obligent à continuer à travailler dans des environnements numériques propriétaires choisis sans aucune réflexion. Et le pire est que nous continuons à le faire sans opposer aucune résistance.

Je parlerai ici du cas Zoom qui me semble le plus parlant - même si ce n’est pas le seul. N’importe quelle réunion, quelle rencontre, quelle activité de recherche ou d’enseignement se passe sur Zoom. Cela est vrai à tel point que ce n’est même plus la peine de demander quelle plateforme de vidéoconférence on va utiliser: c’est zoom.

Or Zoom pose une série immense de problèmes: propriétaire, avec des usages très louches - accords avec des dictateurs, censure, failles de sécurité…

Pourquoi nous avons “choisi” Zoom? En réalité sans aucune raison. Les administrateurs des universités ont pris la “solution” la plus “simple” à savoir celle qui a su mieux faire une campagne publicitaire et s’installer dans le milieu de l’entreprise. Les universités, comme toujours, ont singé ce qui se passait chez les “grands entrepreneurs” - on a toujours un complexe d’infériorité par rapport aux entreprises, on voudrait tellement en être une. Les universités ont dépensé des millions en licences zoom, ce qui a par ailleurs permis à l’entreprise de disposer d’une infrastructure géante. Et les jeux sont faits: meilleure infrastructure, usages généralisés, flemmardise infinie des usager.e.s. Le monopole s’est mis en place.

Nous, chercheur.e.s, n’avons rien fait pour nous y opposer. Certain.e.s par manque de compréhension des enjeux. Et je peux les comprendre: des personnes qui ignorent totalement les enjeux des environnements numériques peuvent ne pas se rendre compte que les solutions logicielles ne sont pas neutres, que se trouver physiquement sur des serveurs privés est problématique et que ne pas savoir ce que fait un logiciel est dangereux. En ce qui concerne ces cas - qui sont probablement la majorité - je ne peux que souhaiter un monde où l’éducation soit plus globale et où tout le monde soit en mesure de comprendre les implications de ses choix et de ses actions.

Mais même les personnes qui comprennent les enjeux ont fait très peu ou rien. Très souvent l’argument était de dire que, vu que l’institution ne proposait pas d’autres solutions, on était obligés d’utiliser ce qu’on avait. On a donc organisé des colloques qui portaient sur l’“analyse critique des enjeux du numériques” sur zoom. C’est un peu comme organiser une rencontre végétarienne dans une steak house.

Je crois que ce type de “compromis” doit être évité à tout prix: si nos institutions ne nous donnent pas les moyens pour faire notre travail, il faut juste dire que nous ne pouvons pas travailler. Céder pour des raisons de simplicité signifie faire en sorte que rien ne change jamais.

Or nous avons bien compris que le passage au travail en environnement numérique n’est pas quelque chose qui finira après la pandémie: les décisions que nous prenons maintenant sont celles qui détermineront le reste de notre vie future. Il faut donc refuser d’accepter le compromis et en même temps essayer de sensibiliser celles et ceux qui n’ont pas les moyens pour comprendre les enjeux.

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